Commémorée le 07 avril de chaque année, le thème choisi en 2025 est: « Mémoire, justice et prévention : ensemble pour un avenir sans génocide ».
Un thème autour duquel la Commission des Droits de l’Homme du Cameroun n’est pas restée indifférente face à cette commémoration qui reste historique et mémorable pour l’Afrique. Voici la déclaration du Pr James Mouangue Kobila, Président de la CDHC👇🏿👇🏿👇🏿
La Commission garde à l’esprit les principaux facteurs historiques et structurels ayant favorisé l’émergence d’une idéologie génocidaire au Rwanda, notamment les discriminations observées sous les régimes des présidents Grégoire KAYBANDA et Juvénal HABYARIMANA, périodes marquées par l’instauration et la légitimation de la suprématie des Hutus, exacerbant les divisions ethniques et consolidant des inégalités profondes.
La Commission accueille favorablement le thème de la Journée internationale de réflexion sur le génocide des Tutsis au Rwanda de cette année 2025 année qui marque le 31e anniversaire de l’indicible – à savoir Mémoire, justice et prévention : ensemble pour un avenir sans génocide. La Commission note que chaque année, des cérémonies se déploient à l’échelle mondiale, en particulier, au Rwanda, comme autant de temps forts de mémoire, de recueillement et d’éducation collective ; elles incarnent la volonté de rendre hommage aux victimes, de soutenir les survivants et de réaffirmer l’engagement contre le négationnisme, l’intolérance et les discours de haine.
La Commission relève que les discours de haine peuvent se manifester de diverses manières, que ce soit lors d’interactions entre personnes ou à travers des plateformes en ligne et qu’ils englobent principalement : les attaques verbales qui sont des propos agressifs ou insultants visant une personne ou un groupe en raison de caractéristiques spécifiques ; l’utilisation d’éléments matériels ou de signes corporels (objets, gestes et symboles) pour exprimer ou promouvoir la haine d’autres ethnies, groupes communautés religieuses ou groupes.
La Commission salue de nouveau l’adoption de la loi du 2décembre 2019 modifiant et complétant certainesdispositions de la loi du 12 juillet 2016 portant Code pénalqui prévoit et réprime l’outrage à la tribu ou à l’ethnie auxalinéas 1 et 3 de son article 241-1 (nouveau) en ces termes e]st puni d’un emprisonnement d’un (01) à deux (02) anset d’une amende de trois cent mille (300 000) à troismillions (3 000 000) de francs, celui qui, par quelquemoyen que ce soit, tient des discours de haine ou procèdeaux incitations à la violence contre des personnes en raisonde leur appartenance tribale ou ethnique [;] Lorsque l’auteur du discours de haine est un fonctionnaire au sens de l’article 131 [du Code pénal], un responsable de formation politique, de média, d’une organisation non gouvernementale ou d’une institution religieuse, les peines prévues à l’alinéa 1 ci-dessus sont doublées et les circonstances atténuantes ne sont pas admises.
La Commission salue les efforts des pouvoirs publics et de leurs partenaires visant à lutter contre les discours haineux et à promouvoir la paix et le vivre-ensemble harmonieux, spécialement à travers la signature, le 6 mars 2025, par une quinzaine de dirigeants de médias camerounais, d’une « Tribune dénonçant la prolifération des discours de haine », réaffirmant ainsi leur volonté commune de promouvoir des pratiques journalistiques responsables.
La Commission relève, pour le déplorer, la récurrence des conflits intercommunautaires dans les Régions de l’Adamaoua, de l’Extrême-Nord, de l’Ouest et du Sud, une situation exacerbée par des facteurs tels que des rivalités historiques et/ou les difficultés d’accès aux ressources naturelles, avec pour conséquences des dommages humains, matériels ainsi que des répercussions significatives sur la stabilité des Régions concernées.
La Commission recommande au Gouvernement de renforcer le cadre législatif et judiciaire, d’établir des mécanismes judiciaires spécialisés pour traiter les allégations de discours de haine et de crimes associés en comparution immédiate.
La Commission recommande au Gouvernement d’atténuer les sentiments d’amertume provoqués par le chômage des jeunes et renforcer l’harmonie entre les communautés en généralisant la culture entrepreneuriale, en multipliant les cadres de formation à l’auto-emploi et en veillant à sa systématisation dans toutes les filières de formation, dès les dernières années de l’enseignement primaire, des études internationales ayant établi que seuls 25% des jeunes devaient avoir accès à un emploi salarié en Afrique subsaharienne entre 2014 et 2024; de renforcer les politiques d’emploi au profit des minorités et des populations autochtones conformément à la Constitution et au Droit international, en encourageant les entreprises à recruter les personnes originaires de ces communautés vulnérables et à investir dans la formation des jeunes de ces communautés dans les lieux d’implantation des entreprises.
La Commission exhorte les parents à contribuer activement à la prévention de la discrimination ethno-tribale et des discours de haine, principalement: en dissuadant leurs enfants, dès leur plus jeune âge, de recourir aux injures, aux discours haineux et en les éduquant sur leurs conséquences, en s’y opposant et en les réprimant ouvertement, fermement et systématiquement ; en inculquant à leur progéniture les notions de la diversité, d’inclusion, de solidarité, du respect mutuel, d’amour, d’interculturalité, de partage, d’égalité des Droits, de responsabilité, de pardon et d’acceptation de l’autre.
CDHC